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Notre histoire en archives : Alfred Dubois, garde-moteur de tramway


Par William Laguë, stagiaire aux Archives nationales du Québec à Sherbrooke
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Photo : Pièce à conviction no 1 de la partie demanderesse dans la cause no 914, Alfred Dubois c. The Sherbrooke Street Railway Co., 1903. Archives nationales du Québec à Sherbrooke, TP11, S8, SS2, SSS1, D914. Photographe non identifié.
Bibliothèque et Archives nationales du Québec Par Bibliothèque et Archives nationales du Québec
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Jeudi 4 novembre 2021

La photographie ne manque pas d'impressionner! Cette dernière a été utilisée comme preuve dans la poursuite judiciaire Alfred Dubois c. The Sherbrooke Street Railway Co. (SSR), à la suite d'un accident de tramway en 1903.

Alfred Dubois, ex-policier et ancien ouvrier à la Jenckes Machine Co., une usine spécialisée dans l'équipement minier, devient conducteur de tramway au début de l'année 1902. Treize jours avant l'accident, la SSR lui impose les tâches de garde-moteur, le temps de trouver une autre personne pour le poste. Durant son interrogatoire, Dubois admettra devant la Cour qu'il n'était pas qualifié pour ce type de travail.

Dans la nuit du 3 au 4 décembre 1903, une grande quantité de pluie s'abat sur Sherbrooke, rendant les rails de tramway glacés. Afin de rendre les trajets plus sécuritaires, des employés de la SSR procèdent au déglaçage des rails. La technique est simple : deux tramways sont accrochés l'un à l'autre et le second pousse le premier, qui est utilisé pour ouvrir la voie. 

L'accident survient à l'entrée du pont Wolfe, alors que le premier tramway sort des rails malgré la vitesse de poussée modérée. Le surintendant Smith, le contrôleur Hogan et le garde-moteur Alfred Dubois, qui occupent le premier tramway, se dirigent tout droit vers les garde-fous. Si Smith et Hogan ont le temps de sauter et d'atterrir sur la chaussée, Dubois n'a pas la même chance. Il expliquera à la Cour avoir essayé de faire marche arrière pour sauver le tramway, sans succès : « Dubois saisit aussi les garde-fous, mais la pièce se brisa et il alla rouler dans le précipice, au milieu des débris du wagon, qui avait été s'abîmer au bord de l'eau. [...] L'infortuné Dubois fut ramassé sans connaissance. »

 

Pièce à conviction no 12 de la partie demanderesse dans la cause no 914, Alfred Dubois c. The Sherbrooke Street Railway Co., 1903. Archives nationales du Québec à Sherbrooke, TP11, S8, SS2, SSS1, D914. Photographe non identifié. 

Les radiographies prises à l'hôpital dévoilent les dégâts : hypertrophie du foie et du poumon droit, luxation de la clavicule gauche, fractures aux bras, luxation des côtes droites... Dubois est en mauvais état.

L'homme décide alors de poursuivre la SSR puisqu'il juge que la compagnie est responsable de l'accident. Lors du procès, Dubois et son avocat ne manquent pas de faire mal paraître la compagnie. L'employé estime qu'en raison de l'outillage de qualité inférieure, de la négligence générale et de l'absence d'équipement préventif au pont Wolfe, un endroit reconnu comme dangereux, la SSR doit lui payer la somme de 5000 $. Il obtient gain de cause peu de temps après le début du procès, et la SSR coopère sans faire appel. 

Le tramway de Sherbrooke a une histoire mouvementée. Vers 1925, l'opinion publique à son égard se trouve considérablement changée comparativement à celle qui prévalait à son arrivée en ville : on trouve que le tramway est lent et encombrant, en plus d'être dangereux. La popularité grandissante de l'automobile n'aide certainement pas sa cause. Le tramway devient rapidement un bouc émissaire; on l'accuse de tous les problèmes de la voirie. À l'aube des années 1930, au milieu d'une crise économique, il a même de la difficulté à survivre. Les dirigeants de la compagnie de tramway lancent un ultimatum à la Ville : si celle-ci refuse de pallier le déficit financier entraîné par la diminution du nombre d'utilisateurs, ils mettront fin aux activités. Le 31 décembre 1931, les tramways cessent ainsi de parcourir les rues de Sherbrooke, laissant place, dès le lendemain, à l'apparition d'un réseau d'autobus de ville

Cette histoire de tramway vous a intéressé ? Consultez le texte publié récemment dans Estrie-Plus, intitulé « John Kerr, chauffeur de tramway des plus malchanceux ».

 

 

Sources :

 

Cause no 914 Alfred Dubois c. The Sherbrooke Street Railway Co., 1903. Bibliothèque et Archives nationales du Québec, Archives nationales du Québec à Sherbrooke, fonds Cour du banc du Roi ⁄ de la Reine du district judiciaire de Saint-François (TP11, S8, SS2, SSS1, D914). 

KESTEMAN, Jean-Pierre, Histoire de Sherbrooke - La ville de l'électricité et du tramway (1897-1929), Sherbrooke, Éditions GGC, 2002, 292 p. 

KESTEMAN, Jean-Pierre, Histoire de Sherbrooke - De la ville ouvrière à la métropole universitaire (1930-2002), Sherbrooke, Éditions GGC, 2002, 489 p. 

KESTEMAN, Jean-Pierre, La ville électrique - Sherbrooke 1880-1988, Sherbrooke, Éditions Olivier, 1988, 234 p.

KESTEMAN, Jean-Pierre, Les chars électriques - Histoire du tramway à Sherbrooke 1895-1932, Sherbrooke, Éditions GGC, 2007, 170 p.

TESSIER, André. « L'Ingersoll-Rand. Vie et mort d'une aciérie géante », Histoire Québec, vol. 8, n° 1, 2002, p. 20.

« Notes locales », Le Progrès de l'Est, 12 mai 1903, https://numerique.banq.qc.ca/patrimoine/details/52327/3545641?docsearchtext=dubois (consulté le 1er avril 2021). 

« Terrible accident du chemin de fer électrique », Le Progrès de l'Est, 5 décembre 1902, https://numerique.banq.qc.ca/patrimoine/details/52327/3545597?docsearchtext=Dubois (consulté le 1er avril 2021).

« Miraculous escape. Street car went over bridge into the Magog River », Sherbrooke Examiner, 5 décembre 1902, https://numerique.banq.qc.ca/patrimoine/details/52327/2986085?docsearchtext=Alfred%20Dubois (consulté le 12 avril 2021).

« Histoire de la Société de transport de Sherbrooke », Wikipédia, https://fr.wikipedia.org/wiki/Histoire_de_la_Soci%C3%A9t%C3%A9_de_transport_de_Sherbrooke  (consulté le 12 avril 2021). 

 

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